« Mon enfant est plutôt gros. Il est l’objet de moqueries et d’exclusion de la part des autres. Comment parler de cette situation avec lui ? Que faire ? Comment le protéger ? »
Une moquerie, ce n’est pas banal
Face aux moqueries, aidez l’enfant à réfléchir à l’importance qu’il leur donne et à sa manière d’y réagir ! Voilà ce que propose le Pr Nicolas Zdanowicz, psychiatre.
On se moque de lui ou d’elle parce qu’elle est « enrobée » ? Probablement. Pourtant, les critiques ne touchent pas de la même manière tous les enfants concernés. « Un grand nombre d’entre eux viennent de familles où les parents sont en situation de surpoids, sans que cela soit forcément vécu de manière péjorative, remarque le Pr Nicolas Zdanowicz, psychiatre aux Cliniques Universitaires Mont-Godinne. Autre différence : pour les parents des milieux intellectuels, la minceur fait généralement partie des normes, alors que dans les milieux moins favorisés, avoir trop de poids peut être corrélé à un bon statut social. Par ailleurs, les filles et les garçons jugés trop gros ne sont pas mangés à la même sauce. Pour les garçons, le surpoids peut être lié à la puissance physique, et devenir un bénéfice secondaire. Pour les filles, en revanche, la vision sera plus facilement négative. » Toutes ces variables entrent en considération lorsque les parents remarquent que l’enfant semble avoir un souci, ou que les jeunes abordent spontanément leurs difficultés face aux quolibets. En tout cas, « même dans les familles où les parents vivent ‘bien’ leur surpoids, un enfant peut se sentir mal face aux critiques », précise le psychiatre.
Pour les parents (et ce, quelque soit le sujet de raillerie auquel est exposé un enfant), « la première règle est de ne pas banaliser ces moqueries probablement non évitables– mais de ne pas dramatiser non plus la situation », explique le Pr Zdanowicz. Même s’ils ne comprennent pas, parfois, où se trouve le problème, pour être soutenants, il leur faut rester à l’écoute et chaleureux.
« Il m’a traité… » Pas content, le bonhomme (ou la demoiselle), de voir son poids raillé par les « copains » ! Du côté des parents, qui proposent souvent des repas plutôt équilibrés, on voit bien que ce sont les grignotages de l’enfant qui contribuent probablement au problème. « Sauf que le jeune, lui, n’en a pas conscience, souligne le Pr Zdanowicz. Alors pourquoi ne pas lui proposer, par exemple pendant une semaine, de lui faire remarquer, juste à titre informatif, toutes ces fois où il mange n’importe quoi, n’importe quand. Ensuite, ce sera à lui de décider s’il veut faire quelque chose, ou pas. Et donc à lui de se prendre en charge… »
« L’idée, c’est que les parents puissent dire à l’enfant : ‘ Il y a un problème, il existe une solution’ », poursuit le psychiatre. Une discussion peut alors être amorcée sur ce que le jeune ressent par rapport aux critiques, et sur l’importance qu’il leur accorde. Parfois, il ne vit pas mal son surpoids. Mais ses kilos entraînent des regards, des mots : ils ont un coût. S’entendre reprocher son poids, est-ce vraiment grave à ses yeux ? Quelle place accorde-t-il aux critiques ? C’est le moment de lui expliquer que, toute sa vie, il y sera confronté, sur ce thème ou sur un autre. Tout le monde passe par là, avant de finir par apprendre à amortir les chocs ou à les gérer. Décide-t-il de ne pas changer, tout en sachant à ce à quoi l’expose cette attitude ? Ou bien l’impact des moqueries l’incite-t-il à vouloir maigrir ? Cette option-là a un prix, elle aussi… Mais ses parents peuvent lui dire que, si tel est son choix, ils tenteront de l’aider. »
Enfin, pourquoi ne pas parler aux enfants du droit à la différence, et du fait que l’on peut (ou que l’on doit) s’aimer soi-même, avec ses différences ? « Toutefois, ce discours n’aura d’impact que si les adultes reconnaissent que ces différences font parfois mal… », rappelle le psychiatre.
Interwiew : Pascale Gruber